En Argentine, nous assistons à un phénomène économique remarquable. Le président Javier Milei a réussi un exploit que peu croyaient possible : transformer un pays enlisé dans les déficits chroniques en un modèle d’équilibre budgétaire. Cette transformation radicale, connue sous le nom de “déficit zéro”, mérite une analyse approfondie pour comprendre comment l’Argentine est passée d’une situation catastrophique à un exemple de redressement financier.
La révolution économique de Milei en chiffres
Le bilan économique de l’Argentine sous Javier Milei impressionne par son ampleur et sa rapidité. Début juin 2025, lors de son apparition au Forum économique de Madrid, le président argentin a été accueilli comme une véritable rock star. Cette popularité s’explique aisément : l’Argentine affiche désormais un excédent budgétaire, un exploit historique pour un pays longtemps synonyme d’instabilité financière.
Les résultats sont éloquents : un surplus budgétaire de 0,3% enregistré en mai 2025, une inflation qui a chuté de façon spectaculaire, passant de plus de 200% en décembre 2023 à 43,5% en mai 2025. Cette performance résulte d’une réduction drastique des dépenses publiques, représentant une baisse de plus de 20% de leur part dans le PIB national.
Le gouvernement a également supprimé l’impôt Pais, une taxe prélevée sur les opérations en devises étrangères qui freinait considérablement les investissements. Plus impressionnant encore, les réserves de la Banque centrale ont été reconstituées, permettant d’assouplir certaines restrictions de change qui constituaient un obstacle majeur pour les investisseurs étrangers.
Ces réussites économiques de Milei en Argentine ont suscité l’approbation du Fonds monétaire international (FMI), qui a validé un programme de financement de 20 milliards de dollars sur quatre ans, témoignant ainsi de sa confiance dans la pérennité des réformes engagées.
La méthode Milei : une stratégie radicale d’assainissement
Comment Javier Milei a-t-il réussi ce tour de force? Sa méthode, surnommée “la tronçonneuse”, repose sur une approche sans compromis des finances publiques. Son ministre de la Dérégulation et de la Transformation de l’État, Federico Sturzenegger, a orchestré une réduction massive des dépenses gouvernementales.
Premier axe d’action : la fonction publique fédérale. Près de 50 000 postes ont été supprimés, allégeant considérablement la masse salariale de l’État. Les transferts financiers vers les provinces ont également été revus à la baisse, forçant les administrations locales à participer à l’effort d’austérité.
Les grands chantiers publics n’ont pas été épargnés. Le gel des travaux d’infrastructure a permis de réaliser d’importantes économies, tout comme la réduction des subventions dans les secteurs de l’énergie et des transports. Ces mesures, bien que douloureuses à court terme, ont contribué au redressement des comptes publics.
La position ferme de Milei face aux pressions pour indexer les retraites et les salaires des fonctionnaires sur l’inflation a joué un rôle crucial. Comme l’explique Alejandro Werner, ancien directeur du département de l’hémisphère occidental du FMI : “Milei a tenu tête à ceux qui le pressaient de les indexer sur l’inflation, ce qui a contribué à l’assainissement budgétaire”.
Cette stratégie a permis non seulement d’équilibrer les comptes, mais aussi de relancer la croissance économique après une période de récession en 2024. Le taux de croissance a rebondi, confirmant que l’austérité bien dosée peut servir de tremplin à la reprise économique.
Les défis futurs du modèle argentin
Malgré ces succès indéniables, le modèle argentin du déficit zéro fait face à d’importants défis pour maintenir sa trajectoire vertueuse. Le FMI vise un excédent primaire de 2,5% du PIB à moyen terme, un objectif ambitieux qui nécessitera des efforts supplémentaires.
Todd Martinez, analyste chez Fitch Ratings, souligne une réalité incontournable : “La forte baisse des salaires et des retraites, via la pression inflationniste, et l’arrêt des investissements en capital ne peuvent être maintenus indéfiniment. Milei cherche désormais à maximiser les gains d’efficacité dans les services publics.”
Le gouvernement devra également élargir son champ d’action. Comme le préconise Juan Luis Bour, économiste en chef du think tank argentin Fiel : “La majeure partie de l’emploi public dépend des provinces, qui doivent à leur tour entamer un programme d’ajustement.” Cette extension des réformes aux provinces représente un défi politique considérable.
Les élections de mi-mandat prévues en octobre 2025 constitueront un test crucial pour la popularité de la méthode Milei. Les Argentins, qui ont subi de plein fouet les effets de l’austérité, confirmeront-ils leur soutien à cette politique rigoureuse ou manifesteront-ils leur lassitude face aux sacrifices demandés?
La pérennité du modèle dépendra également de facteurs externes. Les fluctuations des marchés internationaux, les variations des prix des matières premières et l’évolution des taux d’intérêt mondiaux pourront affecter la stabilité retrouvée de l’économie argentine. La capacité du gouvernement à anticiper et à s’adapter à ces facteurs externes sera déterminante.
Malgré ces incertitudes, l’expérience argentine démontre qu’une politique déterminée de réduction des dépenses publiques peut transformer rapidement les perspectives économiques d’un pays. Le “déficit zéro” de Milei pourrait bien devenir un cas d’école pour d’autres nations confrontées à des déséquilibres budgétaires chroniques.


